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Francis Baudevin

Sans titre, 2011
acrylique sur toile
90.0 x 90.0 cm
Les peintures de Francis Baudevin sont des peintures impeccables. Bien que chaque tableau soit réalisé au pinceau, pas une coulure, pas un défaut, pas une trace ne se devine dans la texture lisse de la matière déposée sur la toile.

Selon un protocole établi et resté inchangé depuis les années 1980, Francis Baudevin opère par prélèvements de motifs graphiques, souvent publicitaires, qu’il réinvestit en peinture. L’intervention de l’artiste réside uniquement dans le choix des images-sources et dans leur modification par soustraction (des signes typographiques) puis agrandissement (du format). Il s’agit d’un geste minimum, d’une intervention moindre, mais qui pourtant projette les motifs choisis par Baudevin dans un autre champ de signification, ou plutôt de non-signifiance.

Lorsqu’il intervient sur le logo de la marque de transport, de courrier et de livraison UPS, il garde exactement les mêmes couleurs, le même agencement, les mêmes rapports entre les formes que l’original. Sans le texte qui identifie la marque, la composition devient une peinture, une œuvre d’art qui s’inscrit dans une histoire des recherches picturales théorisées par les peintres abstraits qui ont précédé Baudevin.

Bien qu’il recycle des motifs issus du monde de la consommation, il opère donc bel et bien au sein du riche héritage de l’abstraction du XXe siècle et il inscrit sa pratique dans un dialogue inspirant avec l’histoire de l’art non figuratif, du carré noir de Kazimir Malevitch au récent courant néo-géo en passant par l’art mathématique zurichois des années 1930. Son domaine d’exploration formel est la géométrie purifiée et élémentaire issue de la peinture concrète, qui, transformée par le graphisme, acquiert une dimension soudainement moins radicale et austère, mais reste un moyen d’interroger le projet culturel de la modernité.

Baudevin ne poursuit pourtant pas la visée des modernes, tels que Vassily Kandinsky ou Piet Mondrian, qui associaient dimensions spirituelles et mystiques à la démarche abstraite ; il emmène le spectateur vers d’autres expériences, visuelles et physiques, qui puisent dans des domaines culturels différents. Son travail nous rappelle alors qu’une démarche artistique s’origine dans un rapport au monde qui excède souvent le strict champ de l’histoire de l’art.
Francis Baudevin, Sans titre, 2011